La minoterie
Au mois de janvier 1848, les sieurs Despalunque et Laruncet donnent à titre de ferme au sieur Cheminade, le moulin de Navarrenx pour la somme de 2700 francs par an et pour deux ans.
Le 30 novembre 1854, le sieur Laruncet déclare à Bernard Bonnefont-Laplace, qu’il possède « dans la commune de Navarrenx, un moulin à cinq paires de meules mis en jeu par les eaux du gave ; que ces eaux sont amassées dans le canal du moulin par une digue transversale construite depuis un temps immémorial sur le lit de la rivière».
La minoterie est l’avancée industrielle du moulin traditionnel fonctionnant à meules. Le principe de la minoterie était connu au XVIIIe siècle quand de grands établissements (sur la Baïse, l’Adour, le Ciron, le Lot...) fabriquaient le minot, aussi appelé «fleur de farine» : il s’agissait de la farine la plus fine qui présentait l’avantage de se concerver très longtemps. C’est pourquoi elle était réservée aux marins qui partaient aux colonies.
Au XIXe siècle, le principe reste le même mais les nouvelles machines, notamment le plansichter, modifient les modes de production dans le sens d’une amélioration de la qualité des farines et des volumes produits. De plus, le capitalisme triomphant des années 1870-1910 permet à de riches entrepreneurs de racheter de petits moulins, soit pour les agrandir et les doter d’un outil industriel grâce à des investissements conséquents, soit à les abandonner pour éviter la concurrence. La famille Masseys est de ces riches conquérants industriels qui s’écartent de la tradition familiale (travaux publics) pour se lancer dans cette nouvelle industrie pleine de promesses qu’est la minoterie.
Après avoir déplacé l’activité de production dans un nouveau bâtiment (et pour cause, cela permettait de mettre les machines hors du champ des crues), Jean Masseys construit un bâtiment flanquant le barrage : une courroie entraînée par deux poulies traversait le canal d’amenée et mettait en mouvement une scie dont l’activité est largement décrite dans les livres de comptes qui subsistent. De nouveaux travaux, vers 1899-1902, ont lieu de façon à installer des sasseurs et agrandir la capacité de stockage des grains. Peut-être est-ce aussi à cette période que la minoterie est agrandie pour installer une machine à vapeur pouvant se substituer aux roues en cas d’inondation. En 1915, les frères Masseys font construire un nouveau bâtiment cadastré (…. ?) très probablement pour abriter une installation électrique.
La minoterie disposait dans les années 1950, d’un contingent d’entre 20 à 30 000 quintaux/an. Les machines étaient mues par deux courroies lancées dans le bâtiment A et entraînant les engrenages du bâtiment B. Il apparaît que la minoterie ne se situe pas sur l’emplacement du moulin primitif, emplacement aujourd’hui occupé par le bâtiment A. La puissance de son outil de production fit de l’usine Masseys, l’une des plus importantes minoteries des Basses-Pyrénées. De trois à sept ouvriers travaillaient quotidiennement avec les frères Masseys.
Le moulin s’agençait à la fin du XIXe siècle sur trois niveaux :
- au sous-sol, se trouvaient les rouleaux à cylindres et convertisseurs destinés à la mouture
- le rez-de-chaussée était affecté à l’ensilage, aux mélanges et aux ensachages.
- le 1er étage était consacré à l’ensilage et sassage
- Le 2e étage avait voué à l’ensilage et au tamisage (plansichters à double tamis).
Les grains, semoules et farines circulaient d’un étage supérieur à inférieur par gravité et étaient hissés vers les niveaux supérieurs par l’intermédiaire d’ascenseurs à godets.
Toutefois, les interventions portées par le précédent propriétaire sur le moulin (remplacement de machines venues de l’extérieur à des fins muséales) nous imposent la prudence en matière de lecture du diagramme de production.
Marié à Marie Mélion-Latapy, Jean Masseys était fils de Jean Masseys et de Marie Lubet. Le 14 mars 1897, Jean Masseys, alors « minotier », décède « en la maison (minoterie) à l’âge de 64 ans.
Au cours des années 1930, le moulin produit de l’électricité. En 1936, la DDA précise que les frères Masseys ont « acquis par prescription, aux dépens de la commune de Navarrenx, l’île qui se trouve le long du canal de fuite ». En 1971, Pierre Masseys, alors conseiller général, vendait son électricité à EDF.