Le barrage de Navarrenx se présente sous la forme d’un long déversoir. Sa partie médiane est équipée d’un passelis, aujourd’hui inutilisé et d’une passe à poissons de type « amortisseurs ». Cette configuration a toujours été en évolution.
En 1665, le barrage était équipé d’un passelis et d’une nasse. Aucune autre information nous permet de situer ces deux ouvrages.
Le 9 mai 1763, les ouvrages hydrauliques sont mis en adjudication. Le 23 octobre 1764, Paul Touron et Bertrand Camy, fermiers du moulin, se voient ordonnés « de démolir les ouvrages par eux faits au passelis et à la passerellle du moulin et de les remettre dans le même état et dans la même solidité qu’ils étaient avant leur entreprise ». En 1764, une crue ouvre une brèche « considérable » dans le barrage. A cette époque, le barrage était équipé de deux passelis. Au printemps 1765, la brèche est agrandie par un nouveau débordement si bien que l’un des deux passelis « se trouvait à sec dans le temps des basses eaux » ; la flottaison se trouvait ainsi « interrompue et le moulin sans eau, toute la rivière passant par la brèche ». Le 15 juillet 1765, la réparation de la digue n’est pas achevée du fait de la décision intervenue, tardivement de « [changer] l’emplacement du passelis ». Or, l’économie de la vallée – et de Navarrenx - repose en grande partie sur le bois. Il faut donc pouvoir assurer le flottage des mats et leur passage dans le passelis au plus tôt. Les travaux sont adjugés pour la somme colossale de 14 400 livres mais « la mauvaise besogne des entrepreneurs, la lenteur de leurs opérations, leur division particulière donnent lieu à des plaintes ». Le 25 juillet, les ingénieurs de la mâture s’invitent à la réunion des jurats pour les exhorter à prendre une décision dans les plus brefs délais. Pressés de toute part, à la fois par les habitants et la garnison soucieux de pouvoir s’approvisionner en farine, et par les exploitants forestiers voulant conduire les troncs d’arbres avant la période d’étiage, les jurats se substituent aux entrepreneurs en procédant à l’embauche sur le champ, d’ « ouvriers à la journée pour travailler promptement à la fermeture de la brèche du moulin ». Le 20 août, les travaux ne sont pas encore achevés. On apprend alors que le barrage était équipé de deux passelis. Le 2 novembre, les experts nommés par les jurats rapportent « que le danger pour les radeleurs vient de ce que les eaux qui descendent par le vieux passelis de la nasse, interceptent la navigation et exposent les radeleurs à de grands dangers ». Il est alors décidé, en décembre 1765, de condamner le vieux passelis. L’affaire dure : la communauté écrit à d’Etigny, intendant de Navarre, Béarn et de la généralité d’Auch. Mis en adjudication en 1760, les travaux
En 1765, se pose la question de l’approvisionnement en matériaux pour la réparation du barrage. Si les galets de rivière sont intéressants dans certains contextes hydrauliques, seule la pierre calcaire permet de construire un barrage bâti. Au mois de mars, le sieur de Vitau proteste devant les jurats car, estime-t-il, l’extraction de matériau sur [mon] domaine a porté de graves dommages à son domaine ». L’extraction avait pour but de réparer la nasse du moulin. Le 11 mars, Joseph Duchêne, ingénieur des Ponts et Chaussées, accompagné des jurats, examinèrent les terres du sieur de Vitau : en contrepartie des dommages effectivement constatés, ils accordent 500 livres « à compte du prix des matériaux qui avaient été pris dans son fonds pour la construction d’un nouveau passelis et la réparation de la digue du moulin ».
De Vitau n’entend pas en rester là, jugeant l’estimation « modique ». Il prétend, de surcroît, que « depuis que le gave a permis de reprendre les ouvrages de la digue, il a été tiré de sa carrière, plus de 4 000 charretées de moellons dont la plus grande partie était d’une grosseur prodigieuse », les jurats rétorquant qu’ils étaient dans « le droit et usage de la communauté pour tirer sans rien payer de la carrière dont il s’agit et située dans la rive du gave, les pierres ou moellons dont on a besoin pour la réparation de la digue ». Les jurats vont jusqu’à affirmer que « le propriétaire a même déjà été plus que payé ».
Le 3 juin de la même année, les jurats constatent que « les crues des eaux successives et multipliées survenues à compter depuis le 17 du mois de mai dernier, avaient enlevé tous les matériaux qui ferment la brèche de la dite pesselle3 et au-dessous du passelis, que cette ouverture qui paraît considérable absorbait et entretenait par son torrent rapide, la majeure partie du gave, que dans l’évacuation des crues des eaux, ils craignent que le passelis ne se trouvât pas assez abondant en eau pour le flottage de la mature».
En janvier 1768, une nouvelle crue « remplit le bassin de gravier et de pierre ».
Le 14 janvier 1774, les experts constatent une brèche « qui se forme à la digue du moulin du côté de Susmiou ».
On le voit, les crues du gave d’Oloron sont d’une violence inouïe. Les infrastructures subissent chaque année les coups de boutoir de la déferlante hydraulique. Toutes les solutions techniques avancées par la communauté s’avèrent impuissantes y compris « la poutre placée au-devant du corps du moulin et qui l’embrasse par entier». Cette poutre était munie de gros pieux afin d’éviter que « lors des inondations de gros arbres ou rochers que l’eau entraîne n’endommagent le corps dudit moulin ». Même la poutre a été « coupée en deux par la dernière inondation » du 15 au 25 juin 1774. Il reste que cette pièce – élastique – est d’une grande importance4 car elle diminue les dommages portés au moulin. Au cours de cette crue, le barrage a été ouvert en plusieurs endroits.
Un premier devis est établi en septembre 1774 pour être adressé à l’Intendant. Celui-ci demande un autre devis, plus détaillé au mois d’octobre 1775. Nous ne savons pas si l’Intendance a financé la reconstruction du barrage, mais les travaux étaient achevés en juillet 1776. Les jurats vérifient alors les travaux : « il s’est trouvé que lorsque les matériaux pour cette réparation ont été portés à pied d’oeuvre, qu’une des grandes vannes du boucau du canal du moulin avait manqué, ainsi que sa jambe et s’était échappée et engagée dans le derrière, d’où l’ayant faite sortir avec le secours d’un tour et d’un câble samedi dernier, on la répara et replaça le lundi, qu’ensuite ayant fermé toutes les vannes pour mettre à sec le moulin, la même vanne se cassa et brisa entièrement de manière qu’il fallu s’occuper à l’instant à former une vanne postiche, pour pouvoir fermer le moulin et ne pas casser les ouvrages ni retarder l’entrepreneur ce qui fut exécuté (…) de manière que le chaussement dudit moulin pour le compte de la ville devra se compter du lendemain mardi 9 du courant. Qu’après le moulin a été mis à sec, le corps de ville a fait faire à Jean Pée, dit Cazemajor, maître charpentier sus dit, une reconnaissance de toutes les réparations (… )».
Au printemps 1777, les eaux du gave emportent à nouveau le passelis et endommagent la digue du moulin : « l’avant bec du passelis est totalement brisé et emporté, les radiers à l’entrée dudit passelis se trouvent endommagés et une bande de fer qui assujettissait une partie a cassé, la partie aval où il avait été ajouté un chausseron recouvert de pales planches, est aussi endommagé sur la plus grande partie de la longueur et s’y forme un sursaut d’eau qui ne peut être que très dangereux pour la flottaison ». Les jurats débloquent des fonds pour « réparer sans perte de temps et pour profiter tout le temps de la saison de l’automne », le barrage et le passelis qui risque « la ruine totale » du fait des affouillements de la partie du barrage située en aval du passelis. Le moulin relevant du Domaine, la communauté demande l’autorisation à l’intendant de « faire travailler à la journée et par économie et mettre à sec le moulin pour reconnaître les ouvrages qu’il convient d’y faire ». Si les suites données à cette demande nous sont inconnues par manque d’informations, les crues ne manquent pas de se perpétuer : en 1780, le débordement du gave et l’orage endommagent le moulin. Devant l’atermoiement de l’administration, les jurats préfèrent, une nouvelle fois, ne pas attendre « la réponse de l’Intendant sans quoi les indemnités au fermier seront considérables ». Le printemps 1781 est marqué par des pluies abondantes et « les débordements extraordinaires » du gave, entraînant l’éboulement du coteau et du chemin le long du canal d’amenée.
Le 17 mai 1782, les jurats, fatalistes, reconnaissent « qu’il y a presque toujours quelque chose à réparer au moulin, digue ou passelis malgré les dépenses énormes qui se sont faites les 25 dernières années, on espère que l’entretien dudit moulin et ses dépendances ne s’élèvera pas dorénavant à la somme de 1000 livres à moins qu’il ne parvienne quelque accident ou quelque brèche à la digue ».
Au printemps 1787, les dommages causés par les crues commandent des réparations « très urgentes » uniquement au moulin.
Le 11 novembre 1788, le sieur Lesponne, maire de Navarrenx rappelle que le nommé Biot, « fermier du moulin, s’étant présenté il y a quelques mois au corps municipal, pour lui annoncer que, pour pouvoir faire travailler quelqu’une des meules, il serait obligé d’ouvrir un trou dans la digue en bois du canal inférieur du dit moulin, qu’il s’obligeait de rétablir en bon état avant la crue des eaux pour éviter tout accident ». Or, Biot, fit ouvrir une brèche dans le canal de fuite mais ne la répara pas après avoir effectué les travaux envisagés. Cette ouverture ne cessant de croître, le maire proposa de convoquer le dit fermier pour lui dire « sa négligence à ne pas rétablir le trou (sic) ». Arrivé sur place, Biot promit de faire les réparations.
Le 24 novembre suivant, est demandé le « dégravoyement du moulin qui se trouvant embarrassé vers le milieu par une prodigieuse quantité de cailloux et de gravier, donne lieu au reflux des eaux qui engorgeant les rouets des meules, en retardent le travail et pourrait dans peu l’arrêter totalement, ce qui porterait un préjudice notable et à la communauté et au fermier ». Les jurats venus visiter le site constatent que « le dit canal était fort surchargé principalement vers le milieu de beaucoup de gravier et des cailloux et qu’en effet, cet embarras causait un refoulement des eaux, qui devait affaiblir l’exercice des rouets et travail des meules, et ralentir beaucoup cette vélocité qui leur est absolument nécessaire pour donner une bonne mouture ».
Sous la Révolution, le moulin est séquestré par l’Etat lors de la suppression des droits féodaux. Le moulin est cédé à la caisse des dépôts et consignations laquelle l’a revendu en 1813 par adjudication publique5 à Jean-Pierre Gastelu pour 67 500 francs . A cette date, les propriétaires du moulin ont demandé, comme le rapporte le Ministre des Travaux Publics en 1873, « qu’il fut bien expliqué que la digue barrant le gave était, comme le moulin lui-même, la propriété des acheteurs et qui fut décidé par un arrêté du conseil de Préfecture des Basses-Pyrénées le 21 octobre 1813 »6. En 1847, les crues ayant emporté une partie du barrage, le passelis, auparavant large de 8 mètres, fut mal réparé par l’usinier. Le passelis céda à nouveau »si bien qu’à partir de 1861, le flottage cessa. Aujourd’hui (1873), ce passelis est dans l’état le plus déplorable et le flottage y serait tout à fait impossible ».
Jean Masseys achète le moulin le 16 avril 1866.
Le 15 mai 1872, un arrêté préfectoral prescrit la réparation du passelis ménagé pour le flottage et la remonte du poisson dans le barrage. Dans le cas de non-exécution de l’arrêté, l’usinier serait pourvu d’office et à ses frais et son usine serait mise en chômage. Masseys refuse l’application de l’arrêté l’estimant infondé : un bras de fer s’engage entre l’administration et l’usinier qui finit par reconstruire le passelis.
En 1885, une crue détruit le barrage. L’année suivante, le barrage fut reconstruit.